Petit laisse toi faire

Un extrait de "Mes pensées"

Ne pleure pas. La vie est dure. Mais ne t'inquiète pas. Aujourd'hui tu te sens seul. Tu te sens faible. La solitude sera ta force demain.

Papa et maman travaillent toute la journée. Les journées à l'école passent et se ressemblent. Ta famille devient une inconnue avec laquelle tu apprends à vivre. Tu ne l'aimes plus. Tu la tolères.
Ne pleure pas. C'est la vie.

Les "grands" comme tu les appelles pensent que tu ne comprends rien à rien. Moi je sais. Tu comprends que cette pouffe qui fait office d'institutrice n'a pas plus de choses à t'apprendre que cet enfoiré de junkie qui traine entre le 10ème et 13ème étage de cette tour qui fait face à l'école. Justement en parlant de junkie, hier en descendant les escaliers avec Rachid, je suis encore tombé sur ses seringues.

Tu comprends que cette tasse, qui fait des gros sourires à ton père, est bien plus que la "simple collègue" comme il le répète, comme s'il voulait se convaincre lui même.

Tu comprends que ta mère est fatiguée. Comme si elle t'élevait seul. Elle rêve d'une autre vie. Tu es la plus belle chose qui lui soit arrivée. Elle t'aime.

Tu comprends que la vie c'est la merde quand, au mileu de la cour, dix garçons t'encerclent et que tu peux rien faire. Personne ne peut rien faire. Et même si quelqu'un pouvait faire quelque chose, il n'en ferait rien.

Tu comprends que c'est la merde quand cette fillette de bonne famille, cette mignonne petite blonde aux yeux bleus, te lache en pleine face "fils de pute" sans se rendre compte de la gravité de ses propos.

Tu comprends que c'est la merde, quand tous tes camarades de classe s'appellent Hycham, Marco, Mohamed, Rachida, Moktar, Julio, Pedro... et qu'en classe tu apprends "Nos ancêtres les Gaulois".

Tu comprends pas quand tu vois à la télé des milliers de gens en train de se faire la guerre, mourrir de faim, tuer des innocents, se suicider, ... tu ne comprends pas tout ça par contre tu comprends qu'aujourd'hui c'est déjà la merde et que demain ne sera pas meilleur.

Petit, tu peux toujours pleurer ou te débattre. La vie c'est...

Petit, laisse toi faire.